Paris, le 05 juillet 2008
Au Camarade Michel Barka
Président de l'UST
OBJET : Lettre de Démission
Cher camarade Président,
Le 21 juin 2008, le Bureau Exécutif de notre centrale s'était réuni pour examiner diverses informations me concernant. Il s'agit notamment de l'existence d'une fiche d'information adressée à la présidence de la République relative à une réunion tenue le 03 février 2008 à N'Djaména par un général rebelle et à laquelle j'aurai pris part. En quittant N'Djaména le 09 mars 2008 pour me rendre à Genève pour participer à la réunion du Conseil d'Administration du Bureau International du Travail (BIT), j'avais bien l'intention de rentrer au pays après un bref séjour à Paris pour un bilan de santé et des soins médicaux, mais, après avoir appris ces informations et connaissant les mauvaises intentions du régime de du Président Deby à mon égard, j'ai préféré prolonger mon séjour à l'étranger car je savais que ma sécurité n'était pas garantie. A cet égard, il ne serait pas superflu de rappeler les faits suivants :
1°) j'ai été licencié le 10 septembre 1992 de mon emploi à la STAR Nationale après 14 ans et demi de bons et loyaux services, à la demande du gouvernement, tout simplement parce que je dirigeais une grève générale;
2°) j'avais dénoncé les présidentielles qui avaient été truquées;
3°) le 27 mai 2007, mon passeport de service avait été confisqué au moment où je m'embarquais pour me rendre à Genève pour participer à la Conférence Internationale du Travail, tout simplement parce que j'avais refusé d'obtempérer aux injonctions du gouvernement qui demandé d'arrêter la grèves du personnel des services publics déclenchée le 02 mai 2007 par l'Intersyndicale dont j'étais le coordinateur;
4°) toujours pour m'intimider, une plainte pour faux et usage de faux a été déposé contre moi parce que j'avais exhibé un document faisant état des sommes d'argent versé au secrétaire général d'un syndicat en contrepartie du retrait de son syndicat de l'Intersyndicale et de la levée de la grève;
5°) enfin, comme vous l'a expliqué Madame la Ministre de la Fonction Publique et du Travail dans sa correspondance n°244/PR/PM/MFPT/SG/DT du 30 juillet 2008, c'est ma seule intransigeance dans les négociations qui serait la cause de l'échec des négociations entamées lors de la grève précitée. A mon avis, c'est plutôt le manque de démocratie et le non respect des droits syndicaux consacrés aussi bien par les conventions pertinentes de l'OIT et du code du travail qui sont à la base de tous nos problèmes.
En effet, l'exercice liberté syndicale ne peut pas se concevoir dans un pays qui n'observe qu'une démocratie de façade et où les manifestations
sont systématiquement interdites. Aujourd'hui au Tchad ou on respecte la volonté du gouvernement en faisant semblant d'être un syndicaliste ou on est
systématiquement intimidé, arrêté, persécuté.
Après avoir fait cette analyse et tenant surtout compte de la personnalisation que fait le gouvernement de la lutte de l'UST, j'ai décidé, conformément aux dispositions des statuts de notre organisation, de vous déposer ma démission du poste de Secrétaire Général. En effet, j'estime que mon maintien à mon poste rendra, d'une part, inefficace mon action, et, d'autre part, mon séjour prolongé à l'étranger causera encore plus de préjudices à la centrale. Par conséquent, il me semble plus sage de démissionner.
Je saisis cette opportunité pour exprimer mes sincères remerciements ainsi que ma profonde gratitude : à tous les militants et
militantes qui m'ont toujours manifesté leur confiance en m'élisant au poste de secrétaire général à l'occasions des différents congrès que nous avions organisés; à tous les camarades membres du bureau exécutif ainsi qu'au personnel pour leur bonne collaboration; enfin à tous
les partenaires et mais de la CSI, de la CSI-Afrique, de l'OUSA, de organisations syndicales africaines, d'Europe, du Canada, des Etats-Unis d'Amérique et des associations de la société civile du Tchad et du reste du
monde.
Djibrine Assali Hamdallah
Source : Le Courrier de l'est