Au Tchad,
seuls 5 % des bénéfices générés par les exploitations pétrolières sont réinvestis dans le développement économique et social de la zone productrice. Le reste est versée dans les structures
administratives de l'Etat et l'armée.
Richard Betalum aurait dû devenir un homme riche. Du pétrole a été trouvé dans son champ. La compagnie pétrolière américaine
Esso y a creusé un puit. Chaque jour, 300 barils de brut en sont extraits. A 140 dollars le baril sur le marché mondial, ca fait 40 000 dollars par jour,
une petite fortune.
Mais nous sommes dans le sud du Tchad. Et pour Richard, la découverte de pétrole dans son champ est plutôt une malédiction. Son champ a été amputé de moitié afin que l'exploitation puisse se
faire. Il a reçu l'équivalent de 1500 euros en guise de compensation.
"Esso a trouvé du pétrole dans mon champ mais je n'y gagne rien, a-t-il indiqué. Le gouvernement m'a intimé l'ordre de céder la moitié de mon champ. Avec les
compensations, j'ai pu mettre un toit en tôle sur ma maison, et acheter deux bœufs. A présent, les bœufs ont été volés, j'ai perdu la moitié de mon champ, et j'ai du mal à nourrir ma
famille", indique Richard Betalum.
Esso continue à forer des puits. Il y en a déjà plus de 500, qui permettent d'exploiter le pétrole à 3 000 mètres de profondeur. Ensuite, le pétrole est acheminé vers les citernes. Le long de
cette route, un oléoduc souterrain a été construit. Il achemine le pétrole vers un port du Cameroun, à 1 000 kilomètres plus au sud.
L'exploitation pétrolière rapporte chaque année un milliard de dollars au Tchad. L'argent sert surtout au gouvernement. Construction de bâtiments administratifs et armement. Les responsables
politiques affirment que 5 % des revenus pétroliers profitent directement aux habitants de la région. Selon le General Jacob Darwish Madel, gouverneur de Doba, région pétrolière au sud du Tchad,
la région pétrolière se développe grâce aux revenus pétroliers.
Et pourtant, dans les villages, lorsqu'une femme doit accoucher, elle parcourt trente kilomètres sur une charrette tirée par des bœufs afin de rejoindre le centre de
santé le plus proche. De nouveaux centres de santé et des écoles sont construits grâce à l'argent du pétrole. Mais les professeurs et le personnel de santé font défaut. Les jeunes des
environs profitent comme ils peuvent de la manne pétrolière.
Ils s'emparent du matériel obsolète laissé par l'exploitation. Les câbles sont exportés vers le Nigeria. Le caoutchouc brûlé est abandonné en forêt. A l'origine, le Tchad s'était engagé à faire
profiter sa population du pétrole grâce à une clef de répartition des revenus qui prévoyait que 80 % des revenus serviraient au développement, 10 % seraient épargnés pour le jour où le pétrole
sera épuisé, et le reste pour le fonctionnement de l'Etat et pour le développement de la zone.
Mais depuis la reprise de la guerre, il a deux ans, la clef de répartition a été revue. 95 % servent au fonctionnement de l'Etat et de la défense, et 5 % pour le
développement de la zone productrice. En somme, les revenus pétroliers servent surtout à acheter armes et munitions.
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