On en sait aujourd’hui un peu plus sur la disparition du principal opposant tchadien grâce aux conclusions d’une enquête tchadienne.
Créée, après pressions de la France, pour faire la lumière sur les événements survenus au cours de l’attaque de rebelles tchadiens sur N’Djamena, début février, et la disparition de trois opposants, les membres de cette commission d’enquête ont été désignés par le gouvernement. Mais, pour la première fois, ils évoquent la mort de Ibni Oumar Mahamat Saleh, ancien ministre et candidat à la présidentielle contre le president en exercice Idriss Deby Itno. Mais la commission n’en est pas pour autant sûre, sept mois jour pour jour après sa disparition.
« Ibni Saleh étant la seule victime à ne pas être réapparue, il est en effet permis de penser qu’il serait désormais décédé. Soit en succombant aux mauvais traitements qu’il aurait subis (coups, tortures, manque de soins et de médicaments, etc.), soit en ayant été assassiné, s’agissant en l’occurrence "d’un assassinat politique» indiquent les enquêteurs dans leurs conclusions.
La commission a établi un faisceau de présomptions graves sur la base de témoignages multiples qui permettent de conclure «au-delà de tout doute raisonnable » à l’implication de l’armée d’Idriss Deby.
« Il apparaît
qu’lbni Saleh n’a pu être arrêté puis détenu que par cette même Armée Nationale
Tchadienne », concluent les
enquêteurs.
Idriss Deby directement mis en cause
Mais surtout le rapport souligne que le président tchadien Idriss Deby Itno ne peut pas y être étranger. Le rapport en veut pour preuve «l’impossibilité que cette action soit le fait d’une initiative personnelle ou d’un quelconque militaire subalterne n’ayant reçu aucun ordre de sa hiérarchie ou des instances supérieures de
l’Etat Tchadien».
Puisque l’implication des plus hautes autorités militaires tchadiennes est ainsi mise en évidence, «se pose
la question du rôle du Chef de l’Etat dans la chaîne de
commandement», accusent sans ambiguïté les membres de la commission.
D’autant, comme le souligne les Tchadiens, que le dimanche 3 février, la Présidence était le seul endroit opérationnel de la capitale où les différentes autorités s’étaient retranchées, aux côtés
du chef de l’Etat. Et que le rapport identifie Brahim Mahamat Itno, neveu du président Idriss Deby, également cousin du général Abderahim Itno, chef d’état-major de l’armée tchadienne comme ayant
été à la tête de l’équipe qui a procédé à l’arrestation d’Ibni Saleh le 3 février à 19h30.
Le rapport qui fait la démonstration d’une action concertée et organisée de l’armée au préjudice d’opposants politiques de premier plan, ne précise pas pour autant pourquoi Ibni Saleh n’est toujours pas revenu des geôles tchadiennes, contrairement aux deux autres opposants enlevés peu avant lui dans l’après-midi du 3 février.
“Donner une suite judiciaire”
Les membres de la commission disent n’avoir recueilli aucune information ou éléments de preuve sur son lieu de détention et les conditions dans laquelle elle s’est déroulée. L’ancien président tchadien Lol Mahamat Choua a été séquestré jusqu’au 14 février puis libéré. Quant au député Njargely Yorongar, qui a faussé compagnie à ses geôliers le 21 févier, il a affirmé que Ibni Saleh arrivé après lui a été frappé violemment «à coups de crosse, coups de poing, coups de pied et conduit dans une cellule» «poursuivre impérativement les recherches et de donner une suite judiciaire». «Je vous redis toute ma détermination à ce que la lumière soit faite sur cette affaire». «effectivement été arrêtés et détenus dans les locaux de la direction des renseignements généraux tchadiens», pourquoi Ibni Oumar Mahamat Saleh n’a-t-il toujours pas été rendu aux siens ?