LE BLOG ACTUTCHAD VOUS SOUHAITE LA BIENVENUE 

Actutchad

  • : Actutchad
  • : actutchad2008@gmail.com
  • Contact

Tchad, Berceau De L'humanité

  • Actutchad

7 août 2009 5 07 /08 /août /2009 22:38

Je précise qu'il s'agit d'un "conte" pour adulte, écrit il y a 20 ans environ. Les lieux existent, vous pouvez maintenant les voir sur ..., mais les noms sont inventés et certains personnages n'ont qu'un très lointain rapport avec des souvenirs.

­  -  As-tu fait bonne route ? me demande-t-il en arabe après le premier verre. Il continue, toujours en arabe :

­ -  Ce soir, je pense que tu préfères te reposer. Je t'ai fait préparer un dîner, tu l'auras dans ta maison, le poste. Il n'y a pas l'eau courante, tu le sais. Je t'ai fait porter un âne d'eau (deux outres de cuir que peut porter un âne). Veux-tu une bouteille de whisky ?

 

Mon rire le surprend, je dois raconter : ­« - Un jour, ton père m'avait fait un beau présent, j'étais un peu gêné, je n'avais pas apporté grand-chose. Je lui demandai ce qui lui ferait plaisir quand je reviendrais, que je pouvais avoir facilement, et qu'il ne pouvait pas trouver. Il me répondit : Une bouteille de whisky. Je manifestai ma surprise : Tu bois du whisky ? Jamais, mais j'ai des amis qui en boivent, me répondit-il d'un air goguenard. Je lui apportai une bouteille. A chaque fois que je revins le voir, la bouteille était sur le plateau. Je n'en buvais jamais, elle ne se vidait pas vite. Je me suis toujours demandé s'il y avait dans cette bouteille, une parabole sur la colonisation : "Toi le blanc, tu apportes à l'Afrique ce que tu peux lui reprendre". Plus tard malgré nos relations, je ne lui ai jamais posé la question, mais l'expérience m'a montré que, dans ce pays tout est signe, tout a au moins deux sens.

 

­ -  J'accepte cette bouteille avec plaisir, mais je la boirai le plus lentement possible, je veux qu'elle dure toujours, c'est la bouteille de ton père, la bouteille de l'amitié. Je te remercie de ton hospitalité. Je dois m'installer. As-tu organisé une réunion, demain ?

­  -  Oui, veux-tu venir dans la sous-préfecture vers neuf heures ?

­  -  Très bien, à demain.

­  -  Inch'Allah ! (si Dieu le veut) Machi Allah ! ("Va avec Dieu", ou : "Que Dieu soit avec toi", en latin : "Dominus vobiscum" ...)

 

Le ciel commence à pâlir. Dans une heure, il fera nuit. Devant le poste, à l'écart des gosses chahutant autour de la voiture, attend, debout dans sa djellabah blanche, un homme grand et sec, au visage noir à l'expression sévère et ennuyée.

"­ -  Salam Alekum ! -  Alekum asSalam ! ­  Tu veux me parler ?

­ -  Je suis le cuisinier du capitaine nasrâni (singulier de nasâra).

­  -  Tu veux être mon cuisinier ? ­ -  Oui, je suis le meilleur.

­ -  Combien ? ­ -  Seize mille. Et un gosse pour porter mon marché.

­ -  Bien, tu es le plus cher ? ­ -  Oui, c'est pour toi. ­ -  Quel est ton nom ? ­  -  Mahamat.

Il n'est pas d'une amabilité folle ... ­

-  Nafarak chounou ? (quelle est ta race) ­ -  Hadjeraï, de Mongo.

Leur réputation passée est toujours méritée, apparemment...

­ -  Connais- tu un boy qui ... -  Je ne connais pas de boy, mais je viendrai demain avec un, inch'Allah. -  Bien, à demain, avant huit heures. ­ Inch'Allah."

 

Assez bavardé ..., il faut trouver un coin pour dormir. Adoum a déjà installé ma natte et mes valises dans ce qui pouvait être la chambre du capitaine. Je dispose moi-même ma moustiquaire "de combat", kaki, sombre, basse. Elle ressemble à un cercueil. Je me suis toujours demandé, du temps de la guerre, ce qui se passerait si nous étions "accrochés" en plein sommeil. Certains refusaient de les utiliser, de crainte d'être pris au piège. Quand les moustiques étaient trop insistants, je choisissais toujours soigneusement mon lieu de bivouac pour être invisible de nuit et je m'y glissais quand tous dormaient.

 

Dans la maison, il reste quelques morceaux de meubles non identifiables. Selon la "bonne vieille tradition", Adoum s'est installé dans le couloir, en travers de l'ouverture (il n'y a plus de porte). Dans une autre pièce, il y a une table et un tabouret métallique, le confort est réduit ! Poursuivant mon "exploration", j'entends un bruit d'eau. Je trouve la "salle de bain". Des gouttes tombent de la douche. Divine surprise, le sultan a fait réparer la douche, "l'âne d'eau" m'attend dans le réservoir au- dessus. C'est la première chose à faire ... depuis ce matin à Abéché, la route, les cahots, la poussière, le soleil ... la fatigue me tombe dessus ; les genoux et les mollets me font mal ... mes trente ans sont loin, ce soir ; la déraison de cette aventure risque de m'apparaître ... vite sous la douche !

Partager cet article
Repost0

commentaires