"Plus de 80% des villas en location à Abéché appartiennent soit aux colonels soit aux généraux", s’est confié un cadre de la Mission des Nations Unies en République centrafricaine et au Tchad (MINURCAT). Ce constat qui, quoi que ne résultant que d’une analyse empirique, n’est pas assez loin de la réalité. "Villa à louer. Contacter le numéro xxxxx", "bureau en location. Contact M. X", etc. De telles affiches sont visibles partout à travers la ville d’Abéché, surtout vers les nouveaux quartiers tel que Kamina Matar (vers l’aéroport international d’Abéché). Pour ceux qui connaissent Abéché, jusqu’à un passé récent, hormis la résidence du présidnt de la République Idriss Déby Itno sise au quartier Goz-Amir, un îlot de luxe dans un océan de misère, les maisons traditionnelles en banco en semi-dur battaient leur plein.
L’administration quant à elle, squattait les vieux édifices datant de l’ère coloniale.
Et pour qui connaît le comportement de nos généraux et colonels, les relations contractuels avec les locataires ne peuvent qu’en prendre un coup.
Le non respect des termes du contrat de bail entraîne une insécurité juridique permanente pour beaucoup d’ONG et particuliers qui ne savent pas de quoi sera fait avenir.
Qu’adviendrait-il en cas de crash ? A-t-on suffisamment mesuré les risques ?
Mbaïdedji Ndjénodji Frédéric
Envoyé spécial à Abéché
Mais en attendant, pour devenir un propriétaire immobilier qui compte à Abéché, un seul conseil : à vos galons !Au-delà de ces agissements déloyaux, vient s’ajouter la question de l’acquisition douteuse des domaines appartenant à ces officiers. Selon un Abéchois ayant requis l’anonymat, le quartier Kamina Matar, situé près de l’aéroport d’Abéché,était jusqu’à un passé récent une réserve de l’ASECNA. Mais aujourd’hui, ce vaste domaine réservé a cédé la place à des constructions en béton, mis en location pour la plupart. La forte concentration des édifices jouxtent littéralement l’aéroport international d’Abéché."Une ONG peut signer un contrat de bail d’une année à raison de 1 200 000 000 FCFA par mois. Mais dans la plupart des cas, il suffit que le bailleur trouve un autre preneur plus disant, pour déloger celle-ci, sans autre forme de procès’’, se plaint un formateur d’une société privée de gardiennage. Il est à signaler que la rupture du contrat de bail par le bailleur sans préavis est le propre de presque tous les bailleurs à Abéché. Il en va de même de l’augmentation substantielle du loyer, sans motif sérieux. "Souvent, dès l’apparition de la lune mon bailleur se présente pour exiger soon loyer", déplore une enseignante.Mais aujourd’hui, la ville a fait un lifting remarquable, suite au boum immobilier, consécutif à la présence des humanitaires à l’Est du Tchad ;Crise du Dafour oblige, des centaines de milliers de refugiés soudanais et de déplacés tchadiens ont pris d’assaut l’Est du Tchad. En dehors des promoteurs immobiliers classiques qui ont su mettre à profit l’énorme flux financier qui circule dans la région, beaucoup sont de haut gradés de l’Armée nationale tchadienne, à devenir bailleurs. Certaines langues vont même jusqu’à affirmer que la plupart de ceux-ci sont issus de l’ethnie du chef de l’État, les Zaghawa.