
Le sang coule des blessures de soldats sudistes exténués par les derniers combats avec des Misseriya: bien qu'ancestrale, la migration de ces nomades arabes vers le sud chrétien est cette année synonyme de violences, dans le contexte pré-électoral soudanais.
Des affrontements entre l'armée sudiste et les nomades Misseriya ont émaillé le dernier mois dans l'Etat pétrolier sudiste d'Unité. Deux soldats sont morts et trois autres ont été blessés dans
les dernières violences."Plus de 200 Misseriya ont lancé une attaque à l'arme lourde contre notre patrouille", tonne le lieutenant-colonel John Madit, rendant visite à deux soldats blessés par
des impacts de balle, assis sur des lits miséreux dans la clinique aux fenêtres brisées d'Abiemnon, une bourgade de poussière et de huttes, à 20 kilomètres de la frontière avec le Nord-Soudan.
"La population souffre parce qu'il y a eu plusieurs attaques comme celles-ci au cours des dernières semaines", ajoute-t-il.
Le Sud-Soudan panse encore ses plaies de 22 ans de guerre civile avec le Nord du pays, un conflit à l'origine de deux millions de morts nourri par des différences religieuses, ethniques,
idéologiques, et des différends sur le partage des ressources naturelles comme le pétrole. Les Misseriya voyagent toujours armés afin de se protéger en cas de vols de bétail. Un accord récent
permet même aux Misseriya de se déplacer au Sud-Soudan avec quelques kalachnikov.
Mais l'armée sudiste affirme que certains de ces nomades circulent avec des armes lourdes portant des treillis militaires. "Traditionnellement, les Misseriya viennent ici avec leurs femmes et
leurs enfants pour trouver de l'herbe fraîche pour leurs vaches (...). Mais certains d'entre eux viennent maintenant sans animaux, ni familles, et équipés d'armes lourdes comme des
lance-roquettes", accuse M. Madit. "Les affrontements sont seulement liés à l'accès au pâturage et aux points d'eau", rétorque auprès de l'AFP Moussa Hamdien, un chef Misseriya.
Des observateurs militaires de la mission des Nations unies au Soudan (Unmis) patrouillent ces zones sensibles accompagnés de forces mixtes (sudiste et nordiste) afin de documenter la situation
sur le terrain, une tâche ardue. "Des combats impliquant 200 hommes devraient laisser des traces importantes, mais nous ne retrouvons pas toujours ces preuves", explique Andrew Wilson, un
observateur néo-zélandais.
Certains analystes estiment que l'armée sudiste exagère l'ampleur de ces affrontements afin d'augmenter sa présence dans ces zones pétrolières stratégiques à l'approche du référendum de janvier
2011. Lors d'une patrouille, les casques bleus ont visité la bourgade d'Abiemnon à deux reprises. Mais des affrontements entre armée sudiste et nomades arabes sont survenus une heure après le
départ des observateurs, rappelant ainsi aux casques bleus à quel point la zone demeure volatile.