L'attaque a eu lieu à Yopougon, un quartier populaire de la capitale économique ivoirienne, fief du président-candidat Laurent Gbagbo. Pendant le couvre-feu nocturne instauré depuis le second tour de dimanche dernier, des hommes équipés d'armes automatiques ont envahi le bureau du Rassemblement des républicains (RDR), parti de l'opposant Alassane Ouattara, selon les témoignages d'habitants. «Les gens à l'intérieur ont hurlé et les hommes armés ont commencé à tirer», a indiqué l'un d'eux, sans préciser l'identité des assaillants. Un responsable local du RDR a expliqué qu'une cinquantaine de partisans de Ouattara étaient alors à l'intérieur. Jeudi, le sol du local était maculé de sang et des impacts de balles étaient visibles sur les murs.
L'incident meurtrier fait monter d'un cran significatif la tension qui règne dans le pays, dans l'attente des résultats de la présidentielle de dimanche. Ceux-ci devaient être annoncés au plus tard mercredi soir. Mais lundi, anticipant probablement la défaite de leur candidat, des fidèles de Laurent Gbagbo ont empêché la commission électorale de les annoncer. Le RDR accuse le président sortant, dont le mandat a expiré il y a déjà cinq ans, d'essayer de voler le scrutin tant attendu dans un pays déchiré par la guerre civile.
Jeudi matin, plusieurs centaines de jeunes ont manifesté à Bouaké, dans le centre du pays, fief de l'ex-rébellion ivoirienne des Forces nouvelles (FN) et bastion d'Alassane Ouattara. Au cri de «On veut (les) résultats, on veut pas Gbagbo», ils réclamaient la publication des résultats. Les manifestants se sont ensuite dispersés dans le calme. Auparavant, des jeunes avaient brûlé quelques pneus dans des rues et dressé des barricades, qui ont ensuite été levées à l'appel des autorités FN locales, tandis que les commerces avaient rapidement fermé.
Interrogé sur la non publication des résultats dans le temps initialement prévu, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a indiqué jeudi que lParis «encourage» la Commission électorale indépendante (CEI) ivoirienne à les publier «dans les meilleurs délais». La France «exhorte les acteurs ivoiriens à tout faire pour permettre un climat politique apaisé et serein», a ajouté le quai d'Orsay. Mercredi soir, la haute commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Navi Pillay, a souligné que dans ce climat, les deux candidats devaient impérativement s'abstenir «de faire des déclarations qui incitent à la violence» et éviter «tout autre action qui pourrait priver la population ivoirienne de ses droits démocratiques».